Chez Mentaïg, au n° 19 rue de la Porte Vieille

Mentaïg revenait du dispensaire, où elle avait vu Whoopie. Elle était encore sous le coup de cette rencontre, et souriait toute seule en traversant le village pour se rendre rue de la Porte Vieille. Elle voulait y manger un morceau avant de se rendre à la mine, pour vérifier si tout se passait bien, comme son nouveau poste de CaM lui en faisait devoir.
Sur le banc devant la maison, une jeune femme était installée, deux tout petits dans ses jupes, et Mentaïg reconnut la silhouette de Gayala. Elle pressa le pas. Elle vit tout de suite que sa visiteuse n'était pas au mieux de sa forme. Manifestement, elle avait pleuré, ses traits étaient crispés, et le silence des jumeaux, trop sages à ses côtés, n'était pas de bon augure. Mentaïg se remémora les termes de la lettre reçue auparavant, et s'approcha.

Bonjour, Gayala. Bonjour, Loan et Abi. Entrez donc. Il fait si chaud, aujourd'hui ! Vous semblez épuisée ! L'ombre vous fera du bien.

Elle tâchait de se montrer rassurante, pour ne pas inquiéter les enfants, mais voyait bien que Gayala souffrait. Elle montra aux petits quelques babioles, avec lesquelles ils pourraient s'amuser un moment, et se tourna vers Gayala, attendant qu'elle reprenne son souffle.

La jeune maman n'avait pas dû attendre longtemps. Mentaig pointa ses jupes en même pas dix minutes et leur demanda d'entrer. Gayala releva la tête et tenta de lui sourire, mais son expression relevait plus de la grimace que du sourire franc, qu'elle avait d'habitude.

Bonjour Mentaig. Oui, il fait chaud aujourd'hui. L'été approche à grand pas...

Elle se leva, aida les enfants à descendre du banc et ils entrèrent dans la maison à la suite de Mentaig. Celle-ci donna quelques jouets à Lonan et Aby, qui allèrent jouer dans un coin, tranquillement, et Gayala alla s'assoire.

Je suis désolée de débarquer chez vous, comme ça, mais je ne me sentais pas d'aller jusqu'au dispensaire. Et puis, je voulais vous voir rapidement. Voilà ce qui m'amène: je suis enceinte de trois mois désormais. Je me sens extrèmement fatiguée, je n'arrive plus à rester concentrer sur ce que je fais, et le plus grave... j'ai des crampes, dans le bas-ventre. Cela n'a jamais été aussi fort, ni aussi douloureux.

Gayala a écrit:

Je suis désolée de débarquer chez vous, comme ça, mais je ne me sentais pas d'aller jusqu'au dispensaire.

En effet, Gayala semblait anormalement fatiguée.

Vous êtes la bienvenue, Gayala. Vous savez que vous pouvez venir ici quand vous voulez.

Gayala a écrit:

Et puis, je voulais vous voir rapidement. Voilà ce qui m'amène: je suis enceinte de trois mois désormais. Je me sens extrèmement fatiguée, je n'arrive plus à rester concentrer sur ce que je fais, et le plus grave... j'ai des crampes, dans le bas-ventre. Cela n'a jamais été aussi fort, ni aussi douloureux.

Hum...

Voilà qui ressemblait fort à une menace de fausse-couche. Gayala était jeune et en bonne santé, certes, mais toujours par monts et par vaux. Et puis des jumeaux, même sages comme semblaient l'être les deux petits qui jouaient tranquillement à l'autre bout de la pièce, c'est épuisant.

Venez donc vous étendre, que je vous examine. Nous y verrons plus clair ainsi.

Elle montrait du menton son lit, dans l'angle de la pièce unique.

La jeune femme obéit et alla s'allonger sur le lit.

Je n'ai jamais ressentit cela auparavant. Ces crampes viennent deux, voire trois fois par jour. De temps en temps la nuit. Je suis obligée de me lever pour ne pas réveiller Elenchild. Je finit mes nuits le plus souvent sur le divan dans le salon. Et je le vois bien, cela inquiète les enfants. Ils voient bien que je ne suis pas de la plus grande forme, et remarquez, ils en sont d'autant plus sages. Mais, je ne veux pas leur faire peur. Elenchild n'est pas au courant de tout ceci. Cela a commencé il y a quelques semaines. Je ne le vois pas beaucoup ces derniers temps.

Mentaïg pratiqua son examen tout en écoutant Gayala. Rien que de très habituel, malheureusement... Elle se redressa, et versa de l'eau dans un bassin pour se laver les mains, tandis que Gayala rajustait sa mise. Pesant soigneusement ses mots pour ne pas l'effrayer outre mesure, elle tenta de la convaincre.

Gayala, si vous tenez à garder cet enfant, il va falloir absolument lever le pied. Vous êtes épuisée. Une nouvelle grossesse, si proche de la précédente, en sus de toutes vos activités, ça fait trop.

Elle tira une chaise pour Gayala et s'assit en face d'elle.

Je ne vois pas trente-six solutions. Vous me dites qu'Elenchild n'est pas au courant : vous devez lui expliquer. Il s'inquièterait bien d'avantage en vous voyant tomber tout soudain que s'il sait ce que vous risquez.

Les jumeaux jouaient toujours sagement dans leur coin, calmes, trop calmes.

Les petits sont trop jeunes pour comprendre, mais ils ressentent votre peur, quoi que vous fassiez.
Si vous voulez mener cette grossesse à son terme, Gayala, il va vous falloir rester couchée jusqu'au bout. Vous pourrez vous lever une heure le matin, pour vos ablutions et les soins aux petits. Une heure encore dans l'après-midi, si vous ne ressentez plus ces crampes, qui ne sont rien d'autre que des contractions, et peuvent provoquer une naissance prématurée. Mais pas plus. Faites-vous aider. Si vous restez seule, et que vous continuez comme ça, vous risquez de perdre votre fruit, alors que ces précautions vous permettront de le porter jusqu'à la date normale de la naissance.

Gayala se laissa examiner et revint s'assoir. En écoutant parler Mentaig, elle devenait de plus en plus blanche, des larmes lui montaient aux yeux.

Gayala, si vous tenez à garder cet enfant, il va falloir absolument lever le pied. Vous êtes épuisée. Une nouvelle grossesse, si proche de la précédente, en sus de toutes vos activités, ça fait trop.

Perdre... perdre mon bébé?... Non... Non... je ne veux pas, ce n'est pas possible... Pas... Pas encore une fois.

Elle tortillait ses doigts, et jetait des coups d'oeil anxieux vers ses enfants.

Me faire aider. Oui, biensûr. Ma nourrice, Guenièvre, elle va bientôt revenir. Aujourd'hui si tout va bien. Elle était malade. Elle s'occupera des enfants. Mais, j'ai toujours... je suis toujours Sénéchal de la guilde du Phénix... Bien que j'avais dit que je démissionerai. Je crois bien... oui je crois bien que c'est le moment, n'est-ce pas?Elle se prit à sourire.

Ce bébé, c'est le fruit de l'amour. Elenchild est présent pour moi. Il m'aime... c'est différent de... Cetnik. Nous allons nous marier, et je sais qu'il sera là pour moi... pour nous. Je ne peux pas perdre ce bébé... je ne veux pas le perdre.

Elle se leva, passa ses bras autour du cou de Mentaig, même si elle savait que ces effusions de sentiments mettaient toujours mal à l'aise la guerisseuse. Mais Gayala lui devait déjà beaucoup, et elle la considérait comme une mère.

Merci, Madame. Merci pour tout ce que vous faites. Pourrez-vous passer à la maison, un jour, si vous en avez le temps?

Gayala avait les larmes aux yeux. Elle y tenait, à cet enfant ! Mais désormais, elle avait en mains toutes les cartes pour lui permettre de venir au monde sain et sauf.
Mentaïg se retrouva soudain enlacée par la dame, et prise dans un tourbillon de remerciements. Elle ne se déroba pas, serra au contraire Gayala dans ses bras.

Ne me remerciez pas, c'est tout naturel. Je passerai vous voir, oui, ne serait-ce que pour m'assurer que vous ne faites pas de bêtises.

Elle sourit, comme toujours un peu mal à l'aise quand on lui manifestait ainsi sa sympathie, se détacha de Gayala. Sa réserve naturelle ne lui avait pas appris à répondre à ce genre de communication.

Tout ira bien, vous verrez. Rentrez vite, maintenant, et allongez-vous.

Gayala relâcha son étreinte. Elle sourit en voyant l'air gêné de Mentaig. C'était une femme pourtant tellement généreuse... Enfin, le hasard de la vie... Elle se dirigea vers les jumeaux et leur prit la main. Les petits lui sourient et levèrent les bras pour que leur mère les prennent dans ses bras.

Pas aujourd'hui, mes bébés. Ce n'est pas possible.

Leur dit-elle doucement. Avec un dernier sourire en direction de Mentaig, ils sortirent tous les trois dans la rue.

Ici, comme sous la porte de chacune des autres habitations de Sancerre, une lettre officielle fut glissée par la main tremblante de Terry, le visage livide, le coeur battant un peu trop vite, à cause de la course qu'elle faisait, mais aussi en raison de ses craintes.

Citation :

Chers amis,

Depuis quelques jours, des rats sont retrouvés morts un peu partout, dans nos rues, nos maisons, et ce sans raison apparente.

Dame Mentaig et moi-même pensons que tout cela n'augure rien de bon, et qu'il est envisageable que nous ayons à faire aux prémices de la peste. Rien n'est encore certain, donc nulle raison de vous mettre à paniquer, mais mieux vaut prévenir que guérir.

C'est pourquoi je vous invite toutes et tous à vous rendre au domaine de Baugy afin de vérifier que vous n'êtes pas malades.

Vous n'êtes pas sans savoir que si jamais il s'agit bien de la peste, celle-ci se propage à une vitesse folle, et que les rats morts sont vecteurs de contamination. Aussi, je vous conjure de ne les toucher sous aucun prétexte si vous en voyez. La milice a été avertie et traitera les cadavres d'animaux avec la plus grande prudence, les jetant au feu sur le terrain de soule qui a été réquisitionné à cet effet. Prière donc de ne pas vous rendre là-bas, sous aucun prétexte.


Terwagne,
Maire de Sancerre

(HRP : Pour savoir si vous êtes contaminé, il vous suffit de vous inscrire sur ce forum et de suivre les instructions dans l'Antre de la puce. Le RP quant à lui se déroule sur la gargotte (ICI).

Bon amusement à ceux et celles qui participeront.)

Voilà plusieurs mois que HDB avait fait fermer la demeure de Mentaig à Sancerre. Il ne savait pas trop ce qu'il devait en faire, les dernières volontés de celle ci n'ayant toujours pas été révélées.

Néanmoins, l'arrivée de Koupaïa changeait les choses. Celle ci refusait de se loger chez Gilliane, estimant ne pas y être à sa place. HDB conduisit donc la vieille femme au 19 rue de la vieille porte.

Une fois la porte ouverte, une odeur d'humidité et de moisissure se fit sentir. HDB regretta de ne pas avoir songé à envoyer quelqu'un aérer la batisse de temps à autre.

Dame, je vous voici chez Mentaïg. C'est en ses murs que nous avons appris à nous connaitre, elle et moi. Il y a nombre de souvenirs invisibles et impalpables ici. Elle aurait souhaité vous y accueillir, aussi je me permets de vous proposer d'y loger.

HDB ouvrit les fenêtres, afin de rafraichir l'atmosphère de la maison.

Installez vous au mieux, j'enverrais quelques hommes avec du bois. Ils vous aideront si vous avez besoin d'eux. Je tacherais de passer vous voir régulièrement. Celà vous convient?

Koupaïa suit HdB dans les ruelles de Sancerre. Il la mène à la limite de la ville, tout près d'une des portes. Il s'arrête devant une maison, précédée d'une cour avec un puits. Sur la gauche, on devine un jardin, qui doit se poursuivre derrière la maison. Mais en quel état ! La ronce et l'ortie y sont reines.

Dame, vous voici chez Mentaïg. C'est en ses murs que nous avons appris à nous connaitre, elle et moi. Il y a nombre de souvenirs invisibles et impalpables ici. Elle aurait souhaité vous y accueillir, aussi je me permets de vous proposer d'y loger.

La vieille écoute avec attention. Elle veut s'assurer qu'elle a bien compris. Il y a tant d'émotion dans la voix de l'homme !

La maison à Mentaïg ?

Ils entrent, et la vieille a la réponse à sa question. Oui, c'est bien la maison de sa petite. Tout ici lui parle d'elle. Par-delà l'odeur de renfermé, elle reconnaît le parfum de la verveine et du tilleul. Mentaïg buvait la verveine à pleins bols. Et Koupaïa lui a appris, toute petite, à mettre du tilleul dans l'eau de son bain, pour se délasser.
HdB ouvre en grand les deux fenêtres. Koupaïa s'approche du lit, blotti dans un angle, à droite, près de la cheminée. Il est fermé par des courtines. Quand elle tapote le gros édredon rouge, la poussière s'envole.
Elle erre dans la pièce, regarde le plancher tout neuf, la table, neuve aussi, qui n'a pas dû beaucoup servir. Près de la porte, un grand coffre de bois poli. Elle n'ose en soulever le couvercle. Plus tard, peut-être.
Sur le dossier d'une chaise, une écharpe de grosse laine bise a été abandonnée. Koupaïa la reconnaît. C'est elle qui l'avait tricotée, bien des années auparavant. Ainsi, Mentaïg l'avait conservée. Les vieux doigts pétrissent la laine, une larme vient mouiller le menton. Koupaïa tourne le dos à HdB, et espère qu'il ne l'a pas vue. Le pauvre a bien assez de son propre chagrin. Avec un soupir, elle abandonne l'écharpe sur la chaise, passe le dos de sa main sur ses yeux.

Installez vous au mieux, j'enverrais quelques hommes avec du bois. Ils vous aideront si vous avez besoin d'eux. Je tacherais de passer vous voir régulièrement. Celà vous convient?

Elle se retourne, adresse à l'homme un sourire qui lui plisse les yeux et tout le visage.

Oui. Je suis bien.

Elle hésite, cherche ses mots. Que c'est difficile !

C'est ma maison ?

C'est ma maison?

La vieille femme semblait émue, même si elle ne voulait rien laisser paraitre. Comme HDB n'avait aucune idée de la destination que Mentaïg souhaitait pour se demeure, il posa sa main sur l'épaule de Koupaïa.

Elle le sera tant que vous le souhaiterez, je ferais en sorte qu'il en soit ainsi, car nul doute que c'est ce que Mentaïg aurait voulu. Si toutefois vous souhaitiez un lieu plus confortable, je vous accueillerais avec plaisir au domaine d'Aupic.

Avec le temps, HDB avait appris à jauger les gens, et, s'il se trompait toujours parfois, celà devenait rare. Tout dans l'attitude et le regard de cette femme lui disait qu'elle passerait quelques temps ici pour retrouver celle qui avait été comme sa fille. Au fond de lui, il ressentait qu'Aupic ne conviendrait pour l'instant pas, et il n'appuya pas trop sa proposition, ne voulant pas lui forcer la main.

Dame, Mentaïg me fut précieuse autant qu'elle le fut pour vous. Aussi, quelque soit vos besoins, faites les moi connaitre et j'y répondrais au mieux.

HdB s'approche. Koupaïa sent sur son épaule le poids de sa main, une main large et forte. Mentaïg avait de grandes mains. Des mains trop grandes pour sa petite taille. Ça la gênait. Koupaïa se souvient comment elle les cachait, dès qu'elle y pensait, dans les plis de sa robe, l'air de rien.

Elle le sera tant que vous le souhaiterez, je ferais en sorte qu'il en soit ainsi, car nul doute que c'est ce que Mentaïg aurait voulu. Si toutefois vous souhaitiez un lieu plus confortable, je vous accueillerais avec plaisir au domaine d'Aupic.

Aupic ? Oui, HdB est baron d'Aupic. C'est un noble, lui aussi. Mais pas comme l'était le père de Mentaïg, né avec une cuiller d'argent dans la bouche. HdB est noble parce qu'il a beaucoup travaillé pour son duché. Elle le regarde droit au visage, comme seules les vieilles femmes ou les mères peuvent le faire sans que ça paraisse déplacé. Elle détaille les yeux bruns, qui ne cillent pas, l'ossature ferme sous la peau, le teint qui trahit le goût de la vie au grand air, les cheveux où pas un fil blanc n'apparaît encore.

Dame, Mentaïg me fut précieuse autant qu'elle le fut pour vous. Aussi, quelque soit vos besoins, faites les moi connaitre et j'y répondrais au mieux.

Koupaïa est mon nom.

Elle n'a plus que cela : son nom. Elle le prononce à la mode de chez elle, en accentuant fortement le "pa".

Précieuse... Oui, mon fils.

Si elle pense encore au temps qui n'est plus, l'eau va couler de ses yeux. Elle ne veut plus pleurer. Elle pose sa main sur celle de l'homme.

Du bois pour le feu j'ai besoin. Demain...

Elle cherche ses mots, montre le jardin.

Un homme pour tourner la terre.

Elle hésite encore. Il a parlé d'Aupic. Elle ajoute, puisant dans le peu de mots qu'elle connaît.

Plus tard, chez toi j'irai. Et aussi... où sont les plantes qui soignent ?

Plus tard, chez toi j'irai. Et aussi... où sont les plantes qui soignent ?

HDB se sentit transpercé par le regard de la vieille dame. Ses yeux, d'une vivacité intense, luisait d'une grande intelligence sur laquelle la tristesse laissait un léger voile humide. Il se sentait comme un enfant face à elle, et il imaginait facilement tout ce qu'elle avait pu apporter à ses protégés.

Suivez moi au fond du jardin, il me semble que c'est là. Vous aurez sans doute du mal à les retrouver, les orties ont repris leurs droits. Je vous enverrais mon homme de confiance, Henry, demain. Il viendra avec du bois pour cet hiver et un ou deux hommes pour nettoyer le jardin, retourner la terre et retirer les plantes qui vous gèneront.

Ils arrivèrent près du carré où Mentaïg cultivait ses herbes médicinales.

Voilà, tout est là. Il reste peut être quelques herbes et préparations au dispensaire Saint Roch. Dame Aryan y fait un peu de nettoyage en ce moment, je vous y conduirais si vous le souhaitez.

Mangeons.

HDB prit le pain tendu. Il n'avait pas faim, mais on ne refusait pas de partager le pain avec une amie. Une amie...il se sentait presque comme un fils face à sa mère, une mère dont lui ne se souvenait plus. Il chassa ses pensées, il ne fallait pas s'effondrer, pas ici et pas maintenant.

Merci.

Tout en machant, HDB se perdit à nouveau dans ses pensées, non plus tristes, mais pleines de nostalgie pour ce bonheur aujourd'hui envolé. Lui qui n'avait jamais cru qu'en ce qu'il voyait, il espérait se tromper et souhaitait que l'âme, ou l'esprit, ou tout autre parcelle de Mentaig fut là, près d'eux. Son souvenir, quand à lui, était ancré au plus profond de son coeur.

Durant votre séjour parmi nous, vous entendrez sans doute mille ragots sur Mentaïg, mais croyez moi, tout ce qu'elle a fait pour Sancerre et le Berry, elle l'a fait en bien, avec coeur et détermination. Nous lui devons tous beaucoup, mais bien peu s'en souviennent.

Le pain a bon goût. Koupaïa mâche consciencieusement chaque bouchée. Ça fait bien longtemps qu'elle ne mange plus que par devoir. Il faut manger. Mais aujourd'hui, le pain est bon. Près d'elle, HdB mange aussi, lentement, sans appétit.

Durant votre séjour parmi nous, vous entendrez sans doute mille ragots sur Mentaïg, mais croyez moi, tout ce qu'elle a fait pour Sancerre et le Berry, elle l'a fait en bien, avec
coeur et détermination. Nous lui devons tous beaucoup, mais bien peu s'en souviennent.

Koupaïa s'imprègne des paroles de l'homme. Pour sûr, Mentaïg a bien fait ce qu'elle a fait. Elle a toujours été ainsi. La vieille se souvient de la petite fille qui restait bien après le crépuscule à user les chandelles pour faire et refaire un sirop, un onguent, jusqu'à ce que la consistance lui convienne. Combien de fois ne s'est-elle pas relevée, passées mâtines, pour intimer l'ordre à la gamine de filer au lit, alors qu'elle tournait en rond autour de la table en se récitant son latin ou son histoire ? Et quand elle l'emmenait avec elle au chevet des parturientes, elle restait là, près des nouveau-nés mal en point, jusqu'à ce qu'ils soient bien crochés au sein de leur mère, ou que Dieu les rappelle. Oui, Mentaïg était déterminée, obstinée, têtue... Pire que ses deux grand-pères réunis, et ce n'était pas peu dire.
Elle hoche la tête.

Les jaloux parlent haut, mon fils. Et ils agissent peu. Ferme tes oreilles. Les miennes choisissent.

Dispensaire ? C'est ... une naissance ?

HDB était surpris. Serait ce Aryan, déjà? Pas le temps de réfléchir, il fallait conduire Koupaïa auprès de la future maman pour s'assurer que tout se passe bien.

Oui Koupaïa, vous avez bien compris, une naissance se prépare et votre expérience assurerait un dénouement heureux. Je vais vous montrer la route.

HDB prit la vieille femme par le bras et ensemble, précédés d'Ysa, ils se rendirent au dispensaire..

La maison de Mentaïg... la maison de Mentaïg.
Ysabeau s'arrêta. Elle ne voyait pas de fumée sortir de la cheminée. Koupaïa était-elle là ? Elle l'ignorait. Elle frappa à la porte, attendit...

Ne recevant pas de réponse, il est vrai qu'il était tôt... elle glissa son premier mot sous la porte.

Citation :

Ma chère Koupaïa,

Ce petit mot pour vous informer que mon amie Aryan, compagne de Jelubir, est au dispensaire St Roch, que l'accouchement a commencé. Son compagnon est auprès d'elle, ainsi que Saya et Claire.
Elle est un peu angoissée, elle souhaiterait que vous veniez l'assister.
J'espère ne pas vous importuner... Sui vous pouviez venir, comme vous aviez pu le faire pour Omi...
Je puis venir vous chercher si besoin est.
A bientôt j'espère
Ysabeau

Puis elle s'en fut en déposer un autre chez HdB, qu'elle ne voyait plus guère. Son ami devait préparer son départ du Berry... Elle soupira.