17 Place de la Halle, Ysabeau, élégances sancerroises

Frais et dispo, telle était la première sensation qui vint à l'esprit de Bragon en ce jour. Il se leva doucement, déposant un baiser sur le front d'Ysabeau et se glissant hors de l'alcôve.
L'aventure avec la bête semblait n'être qu'un mauvais rêve dans sa machoire.
Il s'affaira à réchauffer du pain, du lait, de l'eau pour une infusion tonifiante, essayant de ne point réveiller personne. Il n'était pas très à l'aise en cette demeure qui n'était pas sienne. Il avançait avec moultes précaution de crainte de déranger quelque affaire, de briser quelque vaisselle. Mais il s'affairait, vite, efficacement...Une douce pensée allait vers le soleil couchant, ce soir, serait un beau soir.
Ce matin était jour de récolte. Si l'amas de blé faisait le bonheur, il était agriculteur. Si l'amas de gloire faisait l'espoir, il l'avait perdu au profit du bonheur.

Ysabeau ouvrit les yeux, Bragon n'était plus à son côté mais la place était encore tiède. Elle repensa à la douce nuit qu'elle venait de passer, à côté de lui, dans la tiédeur du lit. Elle se leva, et entra doucement dans la salle commune où elle avait entendu des bruits discrets. Gallup dormait et Swip également. Bragon s'affairait, un pot de lait chaud, du pain, un peu de miel sur la table. Elle l'embrassa tendrement, s'assit et ils partagèrent le premier repas de la journée.
Merci d'avoir tout préparé mon amour. Je vois que la nuit vous a reposé, vous allez récolter votre champ ? Je puis venir vous aider, je ne travaillerai point à mon échoppe aujourd'hui. Partons ensemble, je vais préparer un lait de poule pour nous réchauffer, et je vais garnir un panier de pain et de beurre frais et d'un saucisson pour nous restaurer à la pause.
Elle fit chauffer le lait et la cannelle, battit un jaune d'oeuf avec du sucre et le versa doucement dans le lait bouillant, une mousse légère apparut. Elle versa le liquide brûlant avec précaution dans un flacon qu'elle boucha soigneusement, puis qu'elle entoura d'un tissu de laine, puis de paille, afin qu'il reste bien chaud. Elle le mit dans le panier avec le reste des victuailles, couvrit celui-ci d'un linge, et ils partirent tous les deux vers les champs, laissant la maison à la garde de Swip et de Gallup.

Ysabeau posa une bougie allumée à sa fenêtre, l'entoura d'une guirlande de gui, et accrocha un message

Citation :

Amis qui passez devant mon échoppe, devant ma maison, je vous souhaite à tous une très belle, très chaleureuse, très lumineuse année. Avec des sourires, de la joie, de l'amitié et de l'amour... et aussi, de la bière, de la poire, du génépi, du calva, des fou-rires partagés autour d'un feu de cheminée... Baisers légers à tous et à toutes !

Chère Ysabeau, merci beaucoup pour tes jolies fleurs ! à toi aussi je souhaite tout ce que tu peux désirer, que cette nouvelle année soit encore plus belle que les autres, qu'elle t'apporte douceur et tendresse, deux mots qui te correspondent si bien...
grosses bises et à bientôt !

Puis Jade repartit d'un pas vif, Peter gambadant joyeusement, dans la fraîcheur de la nuit...

Après le travail sur le champ d'Ocyrius, Ysabeau rentra dans sa maison, ranima le feu dans la cheminée et se mit à son travail d'écriture. L'ouverture du bal approchait, et il fallait bien préparer les gages...
Elle sortit quelques feuilles de parchemin, tailla sa plume, ouvrit l'encrier...

Comme c'est difficile de trouver les mots justes, les mots qui chantent...

Mais elle s'entêta... et finit par écrire deux petits poèmes. Maladroits sans doute, mais ils étaient sortis de son coeur. Elle versa un peu de sable sur l'encre, roula soigneusement les parchemins et les rangea dans un petit coffre, se disant qu'elle se remettrait au travail chaque jour.
Mon tendre ami je ne faillirai point à vos gages...

Ysabeau avait fini ses travaux d'écriture. Elle compta les rouleaux de parchemin : un, deux trois... Oui, il y en avait bien huit. Un pour chaque jour de bal. Tout était prêt. Elle referma le coffre, et partit à la Mairie déposer son offre d'emploi pour Bragon. Elle pensait :

... Mais peut-être n'aurai-je pas besoin de huit gages, mon amour. Peut-être arriverai-je à vous reconnaître ? En ce cas les gages se transformeront en cadeaux, pour vous, mon amour...

La salle est chauffée, le bois flambe dans la cheminée. Alors qu’Ysabeau s’éveille à peine elle trouve sa maison ainsi chauffée, un doux parfum de pain grillé lui caressant l’esprit.
Sur la table une boisson chaude, du pain frais grillé, de la confiture, un pot de miel, un motte de beurre, une pincée de fleur de sel accompagnent deux bols. Sur la table, est posé un épi de blé, cueilli ce jour. Dans un coin sombre, à peine éclairé par les flammes réconfortantes de l’âtre, se découpe la silhouette souriante d’un homme assis.

« Bonjour douce Ysabeau,

Voici votre première surprise, une surprise simple et douce, d’un réveil en douceur et d’un petit déjeuner en ma compagnie. »

Ysabeau, dans un demi sommeil, sentit la bonne odeur du pain grillé, et la douce chaleur du feu dans la cheminée. Elle ouvrit les yeux, fit glisser le rideau de l'alcôve, et sourit en découvrant la surprise.

Bonjour mon ami, quel bonheur que de prendre ce premier repas avec vous ! Ce sera le meilleur de la journée n'en doutons point. Merci pour cette douce surprise.

Vite, elle enfila une chemise, passa ses braies et vint déposer un doux baiser sur les lèvres de Bragon. Puis elle s'attabla à côté de lui...

Ysabeau s'éveilla, une nouvelle journée commençait... Elle chercha, fureta, explora chaque recoin de la maison... Pas de surprise ce matin. Mais après tout, c'était peut-être cela la surprise du jour, une absence ? Elle prit son premier repas, il restait un peu de beurre et de fleur de sel de la veille, un bon bol de lait chaud, une miche... et en route pour les champs et l'hermitage où elle devait comme promis laisser un nouveau poème.
En passant devant ses champs, surprise ! Les semailles n'étaient point faites... Pourtant la veille, Bragon et Yxxis avaient travaillé... Tout à coup elle se souvint : la veille, par une fâcheuse étourderie, elle avait vendu tous ses sacs de blé, oubliant d'en laisser un pour les semailles... Elle rit de son inconséquence, sans doute un des effets des nombreux verres de poire ou de kir avalés au bal ou en taverne, et alla vite au marché racheter un sac de blé. Une fois celui-ci dans sa propriété, elle se rendit à la Mairie déposer deux offres d'emploi.

Au moins je ferai deux heureux !

Elle déposa son poème à l'hermitage, puis regagna son échoppe et se mit à travailler les peaux pour les chausses de Miseri...

Sans un bruit Bragon se glissa derrière Ysabeau toute à son ouvrage.

"Ma chère Ysabeau, ange de bonté, Marie noël, je vous enlève."

Bragon tendait un mantel à Ysabeau. Il l'emmena, dans les bois, en une longue promenade, où Bragon s'extasiait devant chaque arbre qu'il nommait, chaque terrier qu'il connaissait.

Ici vivent de forts beaux lapins. Hier au soir ils étairnt en ronde à la lune. Tenez, asseyez-vous sur cette branche basse. Ecoutez, cette douce nature, le bruit du silence, la nature qui s'éveille, le bruit de l'herbe qui se relève libérée du poids de la rosée. Le chant du monde. Et sentez, vous ne sentez pas cette délicieuse odeur?

Ysabeau paraissait étonnée. Brusquement Bragon se lève d'un bond, se jette derrière un buisson.

Je l'ai!!!

Bragon réapparait avec un panier chargé de victuailles, de lait de poule, et d'une tarte aux pommes encore chaude, emmitouflée dans un linge épais.

Chère Ysabeau, si vos occupations de maire nous éloignent, j'en souffrirais. Mais chacun de vos regards sur moi seront autant de bonheurs, chaque sourire un soleil d'hiver.

Ysabeau, je vous avais préparé un poème très mâle, mais face à votre amour, il serait pâle. Seule la nature dans toute sa splendeur, sa magie, peut rivaliser de douceur. Ysabeau près de cette source un soir, ma flamme s'est à vous révélée, depuis je ne vis que dans l'espoir de ces moments ma main dans la votre posée.

Ysabeau, ravie de la surprise, déposa un doux baiser sur les lèvres de Bragon.

Cette promenade fut un enchantement mon doux ami, et chacune de vos paroles, chacun de vos gestes de tendresse restera gravé dans mon coeur. Je vous promets que même à la Mairie, je penserai à vous. Et que j'essaierai de m'évader le plus souvent possible pour venir vous voir, chez vous ou en taverne, ou en tout autre endroit où il vous plaira de m'emmener. Merci de tout ce que vous êtes, merci de tout ce que vous m'offrez.

Jelubir vint frapper à la porte mais Dame Ysabeau devait être très occupée à battre la campagne (électorale ). Il déposa au pied de sa porte une bouteille de champagne afin de la remercier d'une si bonne nouvelle qu'elle lui apporta ce matin. Il reparti, sifflotant vers la taverne pour offrir une tournée générale afin de fêter le deuxième prix du loto ducal :sunny:

Ysabeau trouva la bouteille de champagne à sa porte. Elle la prit en souriant et la déposa au frais, elle trouverait bien une occasion de la partager avec ses amis...
Merci Jelubir !
Puis elle se mit en devoir de commencer la confection de la chemise de Lems, s'attachant à choisir les plus belles pelotes de laine... Enfin, elle fouilla dans son coffre, sortit un quatrième rouleau de parchemin, et se dirigea vers l'hermitage.

En rentrant de la taverne, Mentaïg s'arrêta un bref instant chez Dame Ysabeau, le temps de déposer un parchemin roulé sous le heurtoir de la porte.
"Pouvons-nous nous rencontrer dans une taverne calme afin de discuter paisiblement ?
Bien à vous,
Mentaïg"
Puis elle s'en fut préparer son dîner.

Bragon passait devant la maison de madame le maire... (çà fait drole de l'appeler ainsi!). Il s'arrêtat un instant déposant un rouleau de papier.

Citation :

Ma chère amie,

Je tenais déposer ici un billet pour vous féliciter de vos nouvelles fonctions. Vous voilà après la dame la plus importante séant à mes yeux, la dame la plus importante aux yeux des sancerrois.
Cela va vous occuper souvent, et nos moments ensembles deviendront des instants. Il nous reste à en faire des instants intenses.

Il est temps pour moi d'aller aux champs, vous rejoindre.

Le coeur léger, le nouveau forgeron parti au n°20